Déchéance d'ampathie-B.Senouci

 


Il y a eu les attentats meurtriers du début et de la fin de l’année 2015.  Celui de janvier avait entraîné une vaste mobilisation, mais aussi un début de polémique entre ceux qui proclamaient « Je  suis Charlie » et ceux qui s’y refusaient, sans que cela altère le sentiment d’indignation de ces derniers. L’attentat de novembre n’a été l’objet  d’aucune controverse. L’ensemble de la société l’a condamné. Il a même donné lieu à un élan spontané qui s’est traduit dans les sondages par… une augmentation de la sympathie de la société française envers ses musulmans ! Le fait que les 130 morts reflétaient la réalité de la sociologie française y a été pour beaucoup.

On aurait pu construire sur ce rapprochement, cette bouffée d’empathie, pour remettre à plat les problèmes qui empêchent la France de faire véritablement, totalement société, notamment les sources de ressentiment que constituent les inégalités de fait qui démentent chaque jour la devise de la République.

Ce n’est pas le chemin qui a été choisi. La préférence a été donnée à l’injonction du refus d’expliquer, de penser, et au confort illusoire de la fabrication d’un ennemi extérieur, essentiel, produit d’une communauté musulmane sommée d’extirper de son sein les germes qui l’auraient produit.

En fait, c’est la France des banlieues, et son peuple coupable de dissemblance, qui a été déchue, sinon de sa nationalité, du moins de l’empathie qui court en théorie au sein d’une société rassemblée par des aspirations communes plutôt que par une uniformité factice.

Habituellement, c’est la société qui cède à ses démons, l’intolérance et la haine. C’est normalement aux politiques et aux intellectuels que revient la charge de l’empêcher de se laisser entraîner vers sa plus mauvaise part. On a ici l’étrange sentiment d’assister au scénario inverse…