A. KHELIL- LE TROPHÉE DE LA COUPE D’AFRIQUE...


Cette force vive de la nation qui porte en elle l’espérance d’une vie meilleure et tranquille dans une nouvelle République d’un pays de droit en gestation à construire pas à pas, a raison de refuser d’être injustement considérée comme un simple et banal « conglomérat » d’individus sans ambition aucune et, sans esprit créatif auquel d’aucuns veulent l’assimiler. Cette nouvelle République est possible et réalisable car pour une fois après de nombreuses décennies d’hibernation, d’enfumades et de manipulations malsaines de la part de dirigeants et de gouvernants prédateurs et irresponsables, la détermination de sa jeunesse et de ses forces vives à vouloir changer l’ordre des choses pour se prendre en charge sans rien demander à l’État qui a failli à sa mission de protecteur des institutions de la République existe et ne cesse de croître. Elle ne demande somme toute, que la mise en place des conditions idoines à sa volonté d’épanouissement, mais cette fois-ci, convenablement ancrées dans les principes d’un authentique État régulateur fort et juste, garantissant l’égalité des chances pour tous et l’équité dans la répartition de ses ressources nationales.

Pour ce qui concerne le foot tout au moins, et en attendant que le reste des secteurs et domaines d’activités suive dans l’intérêt du pays et pour la quiétude de notre société qui se doit d’être apaisée, c’est là, le résultat d’un travail remarquable accompli par le jeune entraineur Djamel Belmadi, ce « magicien » et excellent « architecte » d’une équipe qu’il a su mener vers la victoire et nous faire partager une épopée magnifique. En très peu de temps, il a su transmettre à ses joueurs ; la fougue, l’esprit de la gagne, la « grinta », cette ténacité à vouloir faire d’un effectif jusque là mal valorisé, une équipe chatoyante, pétillante et bourrée de talents subtilement détectés et mis en valeur après avoir mis fin à la politique sportive suivie jusqu’à son arrivée, celle du mandarinat et des interférences occultes, lui le vrai coach qui a su pleinement et de façon professionnelle, assumer ses responsabilités et montrer qu’avec de la discipline, du sérieux, de la mise en confiance des joueurs et de l’équité, on peut arriver au sommet de la hiérarchie africaine.

Il s’est même permis le luxe de disposer de deux équipes en une, et c’est là son meilleur tour de magie, préservant ainsi la cohésion de son collectif du chantage que certains auraient pu être tentés d’exercer sur lui pour se la jouer stars indétrônables et inamovibles. C’est là, chose qu’aucun autre entraineur parmi ses nombreux prédécesseurs n’a su ou pu réaliser. Il en est de même pour les institutions de l’État qui n’ont reposé leurs actions que sur des contingents de commis canassons, de surcroît malhonnêtes et mafieux qui ont couvert leur pays et leurs familles de honte, eux les locataires de la prison d’El Harrach et ceux qui vont probablement suivre jusque l’assainissement total de cette gangrène … Alors ! Est-il possible de demander au peuple d’être recta, quand ses dirigeants ne font pas montre de rectitude morale ?

Le collectif solidaire qu’il a bâti en l’espace de quelques mois et à partir d’un judicieux dosage de joueurs locaux et leurs coéquipiers évoluant dans des équipes européennes huppées ou non, est une manière de dire aux esprits mal intentionnés qui gravitent tels des « bourdons nuisibles » autour de la fédération de football, eux les frustrés, les gens haineux qui excellent dans la tchate de la division au niveau des plateaux des chaînes privées chevillées à la culture de la désinformation et de l’intox nourrie par la critique négative, le copieux épanchement salivaire et la palabre sans intérêt à caractère souvent subversif.

Oui ! Djamel Belmadi a raison de considérer qu’il n’y a aucune différence entre les enfants d’un même peuple, quelque soit le lieu où ils vivent et travaillent. Bien au contraire, si nous voulons faire avancer notre pays, cette « alchimie » du genre doit prévaloir dans tous les domaines de la vie publique ; dans nos universités et grandes écoles, dans nos hôpitaux, dans le monde de la culture et de l’art, dans la justice et même dans le domaine jusque là réservé, de la politique à ouvrir à notre diaspora. L’Algérie n’est pas et ne peut pas être la propriété exclusive de gens nantis que le système a fabriqué artificiellement pour tenter de survivre et pour profiter à lui seul des ressources matérielles et immatérielles de notre pays ! L’Algérie appartient à tous ses enfants femmes et hommes qui l’aiment, la chérissent et croient en son avenir !

Ceci pour dire que la discrimination entre enfants d’un même peuple est une profonde injustice et forcément, un acte de mauvais aloi attisant la division source de régression et de permanence de l’esprit rancunier et défaitiste qui ne sied plus à notre jeunesse pleine de joie et d’allégresse que le Hirak a réussi à mettre sur orbite. Cette pratique est donc à proscrire au plus vite, et cette complémentarité entre citoyens algériens des deux rives de la Méditerranée et au-delà dans les lointaines contrées des Amériques, de l’Asie et de l’Océanie est à consacrer durablement dans notre prochaine Constitution revisitée. C’est là, une manière de faire entrevoir l’espoir pour une Algérie fortement unie dans ses différences plurielles qui font toute sa richesse comme l’atteste cette gigantesque et extraordinaire joie exprimée par toute la communauté algérienne à travers le Monde et donc, pas seulement qu’en Algérie. Nul n’a sur l’autre la primauté ni le monopole dans l’amour de la patrie, faut-il finir par s’en convaincre et de façon définitive.

À défaut d’être le fruit d’un long travail minutieux, rigoureux et soutenu de la part de notre diplomatie qui a souvent failli dans sa mission essentielle comme cette fois-ci encore, au Caire, la construction d’une image d’un pays animé par une volonté de réussite a été encore une fois accomplie par nos « guerriers du désert » qui par leurs efforts jamais ménagé en sueur, en blessures et parfois en sang versé, ont restauré notre fierté enfouie dans nos tréfonds. C’est cela le véritable enjeu de notre participation à cet événement continental que fut la Coupe d’Afrique des Nations 2019 que nos guerriers ont ramenée dans leurs bagages et offerts à leur peuple qui a su les accueillir si chaleureusement et si généreusement. Disons merci à tous ces talentueux et vaillants joueurs et, à ces nombreux supporteurs qui ont pris part à cette épopée, pour nous avoir remis l’instant de cet événement sportif, dans le courant des gagnants et des nations qui retiennent l’attention des autres. « One, Two, Three, viva l’Algérie » est notre cri de rappel et de ralliement autour de la Mère Patrie dans l’union, le partage et la solidarité…

LE CHANGEMENT GLOBAL : LA NÉCESSITÉ DE L’HEURE !

Oui ! Le moteur « turbo-jeunes » de l’Algérie d’aujourd’hui plus que celle d’hier, a besoin de bons « mécanos » à tous les niveaux de la vie publique comme l’a été notre entraineur qui a su extérioriser toute la puissance intrinsèque de son collectif sportif marqué par son esprit de solidarité du : « tous pour un, et un pour tous » ! C’est là, la vraie mesure de la performance, de l’effort soutenu, de la compétition et de la quête de l’excellence. C’est cet état d’esprit que nous voulons retrouver partout chez la classe politique, chez nos dirigeants et nos gouvernants. Il y a tellement de choses à faire pour inscrire la joie dans la continuité de l’action que l’essentiel est que nous puissions tirer tous les enseignements et toutes les leçons pour mieux nous aider à avancer, à construire et à consolider l’édifice Algérie de toutes et de tous et pour toutes et tous. Ceci ne doit pas concerner le seul domaine et secteur du sport. Mais aussi, dans bien d’autres certainement plus vitaux pour une jeune nation en construction. Il faut donc que nous soyons animés par une volonté forte, en toute franchise et dans l’intérêt général pour mener et réussir le changement global nécessaire que notre grand mouvement du Hirak veut mettre en place pour mettre sur rail l’Algérie de demain extirpée de toutes les tares du passé et les impasses où système non encore totalement éradiqué nous y a menées.

Nous devons retenir comme enseignement majeur, que l’Algérie qui gagne est celle qui sait et accepte de faire reposer toutes ses actions sur ses moyens propres et notamment, sur sa ressource humaine. Celle d’ici et d’ailleurs sans aucune exclusive ou parti pris. Elle a terriblement besoin de toutes ses élites : pour restaurer son système éducatif et de formation, pour faire le l’université, des centres de recherches et des instituts de formation la locomotive puissante du développement, pour asseoir une authentique politique publique de santé, pour amorcer la reconstruction de son tissu industriel délabré et démantelé par des décennies de politiques libérales marquées par la prédation et la fuite des capitaux, mais aussi, par une économie de bazar du tout venant de la malfaçon et de la contrefaçon génératrice de rentes colossales, pour faire du développement des secteurs du tourisme, des services productifs et de l’agriculture des alternatives d’anticipation et des solutions durables. Tout cela est à notre portée, si nous songeons à faire du triptyque : éducation, formation, emploi, l’ossature véritable de notre politique de développement à moyen et long termes.

Devenir productifs dans une conjoncture devenant de plus en plus difficile, ne consiste pas seulement à le décréter et à le décider par des effets d’annonce. C’est tout d’abord, mettre entre parenthèse l’instant d’une mobilisation sans faille pour un sursaut salvateur et surtout durable: les chicaneries, les palabres stériles et sans fin, les animosités, l’invective, les faux problèmes et toutes ces tentatives grossières de clans, de groupes d’individus et d’intérêts communs, animés par des desseins pour le moins qu’on puisse dire, opaques, pas très clairs et certainement sans retombées positives pour un pays qui se doit de corriger impérativement sa trajectoire de développement, en mobilisant toutes ses forces et ses moyens matériels et immatériels sans aucune exclusive.

Si nos dirigeants hésitent encore à s’engager avec détermination, clarté et sincérité dans la voie du changement réel, c’est qu’ils pensent à tord que le maintien du « statu quo » leur permettra de gagner du temps, alors qu’en fait, ils sont là dans la position de l’autruche qui enfonce sa tête dans le sable, pour ne point voir venir le danger éminent qui guette notre pays si une rupture n’est pas assurée avec les méthodes et la nature de la gouvernance qui a mené notre pays dans l’impasse durant plusieurs décennies. Et c’est pourquoi, dans leur entêtement, ils restent dans l’approche de la séduction alors qu’il s’agit plutôt de gérer les affaires publiques avec rationalité, parcimonie et efficacité. Mais jusqu’à quand, devrions-nous rester dans cette situation de léthargie, de pilotage à vue et d’improvisations ? Il faut se le dire sans risque de pouvoir se tromper, qu’aucun de nous et quelque soit sa compétence et/ou son expérience, ne peut détenir à lui seul la vérité qui doit impérativement et inexorablement éclairer la marche d’une nation vers son destin.

C’est là plutôt, l’affaire de tous. Ce qui suggère forcément une prédisposition à l’ouverture au dialogue serein et véritable, à la consultation, à l’avis des femmes et des hommes de savoir, et à la remise en question de certitudes arrêtées par les tenants du pouvoir parce que l’évolution de toute société ne peut se concevoir que dans un perpétuel changement qui sous-tend bien évidemment, une permanence dans la négociation, dans le dialogue et dans la recherche d’un consensus autour des questions majeures, déterminantes pour l’avenir de notre pays en tant qu’entité dont la souveraineté et la place dans la région et le monde seront enfin défendues et protégées. L’Algérie a trop souffert pour prêter encore une fois, le flanc à tous ceux qui cherchent à la déstabiliser et à lui faire emprunter des chemins sans issues. L’incompétence des uns, l’entêtement et la méprise des autres nous coûtent chers et nous mettent en danger réel. À trop vouloir jouer avec le feu, l’on finit par se brûler. La sagesse doit être le seul guide dans cette phase difficile que traverse notre pays, et l’intérêt national doit être au-dessus de toutes autres considérations connues ou cachées.

Face à la peur de la rue qui craint que toutes ses revendications au demeurant légitimes ne puissent être satisfaites et à la détermination des tenants du pouvoir à vouloir maintenir le statu quo par crainte d’être eux aussi poursuivis, il n’y a que l’amnistie générale sur des bases claires et véritablement identifiables et contrôlables qui puisse nous permettre de nous extraire de ses sables mouvants dans lesquels notre pays s’est enlisé. Pour ne citer que l’exemple de l’Afrique du Sud de Nelson Mandela, la Commission « Vérité et Réconciliation en Afrique du Sud » instaurée en 1995 en vue d’une amnistie a permis malgré les difficultés de départ, liées à la réticence des Blancs à assumer le passé de l’apartheid et des inégalités économiques qui maintiennent encore jusqu’à ce jour une grande partie de la population noire dans la pauvreté, le bouleversement du système politique et le passage à une ère nouvelle.

Suite à ce processus de dialogue instauré, la démocratisation s’est traduite par un changement du personnel politique qui a permis la promotion de valeurs morales et politiques entièrement nouvelles. Cet exemple de cette grande nation qu’est l’Afrique du Sud qui n’a certainement rien de comparable avec le cas algérien, n’est cité que pour dire, qu’avec de la volonté de part et d’autre, le changement est plus que possible et réalisable quand la raison prend le dessus sur les positions étroites et tranchées qui ne peuvent mener qu’à l’affrontement violent, improductif et destructeur. Cette amnistie a un prix à payer pour les uns et les autres. Il est pour nous, celui important :

$1·        De la restitution de tout l’argent dérobé à la collectivité nationale et la remise en fonctionnement de l’outil national de production et de réalisation, en échange d’un allègement des peines encourues après jugement, mais sans offrir à leurs acteurs la possibilité de retour à la politique et aux affaires ;

$1·        De l’organisation et de la traçabilité du marché informel source de tous les dangers sur la base du système de facturation, de l’introduction du chèque dans les transactions commerciales et du recouvrement fiscal selon un calendrier établi d’un commun accord. Le changement de la monnaie est un premier pas dans l’assainissement de ce domaine d’activité d’une économie souterraine incontrôlable;

$1·        De l’assainissement du climat politique par la mise à niveau des partis sur la base de valeurs universelles en vigueur dans les pays dits démocratiques et par la libération des détenus d’opinion;

$1·        De la reconsidération des conditions d’éligibilité des élus pour les deux chambres (APN et Conseil de la Nation) et au niveau local (APC et APW);

$1·        Du départ de certaines figures et commis de l’État qui ont marqué leurs passages par des attitudes indignes de non respect des valeurs et de la légalité républicaine.

Ces quelques points évoqués et au demeurant non exhaustifs, doivent être portés par une charte de déontologie consensuelle, reflétant largement les préoccupa        tions des millions d’Algériennes et d’Algériens qui depuis le 22 février 2019 ne cessent d’exiger et de croire en l’émergence d’une République véritablement libre, sociale, démocratique et souveraine, ce second grand trophée tant attendu par notre peuple pour faire perdurer sa joie et son allégresse…

*Professeur