INTERVENTION DU PR KANDIL

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INTERVENTION DU PR KANDIL LORS DE L'ASSEMBLEE GENERALE DE L'ASSOCIATION DU 13/07/2011 

BISMILLAH EL RAHMANE EL RAHIM. Mesdammes,Messieurs ,honorable assemblée....

Permettez-moi avant d'aborder ma modeste allocution, de vous narrez, une histoire Mascaréènne ou plutôt Algérienne.

Il était de coutume,à une époque récente, de raconter des histoires dites de Mascaréèns pour égayer l'assistance,qui, le plus souvent vivait dans une atmosphère de tristesse journalière, subissant les multiples aléas et contraintes drainées par le quotidien.

Cette mode a pris naissance, je ne sais où, ni comment. El moufid,elle permettait aux gens de rire, de se décontracter,notamment ceux de la capitale si stressés...

Personnellement,quand on me posait la question : « Pourquoi Mascara?», je répondais : « Parce que le Mascaréen accepte, de naissance, l'humour et le cultive. Au reste du pays de faire la même chose ».

Je reviens à mon histoire Algérienne. Elle a débuté il y a quelques semaines, à l'occasion des épreuves du BAC .Après plusieurs jours de correction,les résultats sont enfin publiés. Et alors quelle surprise !!!Le classement donné par wilaya révèle que l'inattendu s'est produit! Il fallut lire à deux reprises la liste des résultats pour en être convaincu :Voilà que l'on nous annonce que des Algé-riens de Mascara devancent au classement les Algé-rois qui aimaient tant rire des histoires Mascaréennes. Alors,cette victoire mérite une bonne et immense Tasfiga.Un grand merçi aux élèves et à leurs enseignants de la capitale de l'Emir Abdelkader.

Revenons maintenant à ce qui nous réunit aujourd'hui.

Me voici une nouvelle fois,au rendez-vous, répondant à l'appel de ma ville natale, Mascara la célèbre à laquelle j'associe Tighennif connue mondialement sur le plan scientifique grâce à la découverte archéologique de l'homme de Palikao.

La température extérieure particulièrement élevée, n'efface cependant pas la chaleur des cœurs de l'assemblée qui nous entoure.

Cette digne assemblée réunie une fois par an à l'issue de l'année scolaire ;a pour coutume de récompenser les meilleurs et d'encourager les moins performants.

En ce qui concerne notre ville, les résultats obtenus au BEM et au BAC, soulignent le sérieux et le travail effectué par notre ancien collège qui a contribué au classement des couleurs de celle-ci en deuxième position nationale.

Ceci est dû certainement à l'effort, à l'abnégation et au courage de ses enseignants ainsi qu'au sérieux méritoire de ses élèves.

Je siège en haut de l'estrade, à la demande de notre cher président de l'association,le docteur Bouçif Djillali,dont la renommée a dépassé les frontières, qui m'apprécie beaucoup, et qui fait appel à mes modestes connaissances ainsi qu'à mon âge, pour me confier en ce jour, l'énorme tâche de m'adresser à cette honorable assemblée. Il est évident que les anciens élèves de ce lycée occupent actuellement,pour certains, des postes de haute responsabilité dans la vie publique et qu'il aurait été judicieux de leur confier cette honorable mission. Les rencontres à venir au sein de notre association leur permettront sans doute de le faire.

En ce qui me concerne, je ne parlerai pas de la situation politique qu'elle soit mondiale, régionale ou locale. Les événements sont si complexes et flous que les spécialistes eux-mêmes s'y perdent.

Je ne ferai pas, non plus, allusion à l'étude de l'environnement et du climat qui semble à la mode puisqu'à mon avis, seul dieu détient la vérité et que nos savants sont souvent en porte à faux.

Je ne parlerai pas non plus de la poussée fantastique et du développement dans les divers domaines scientifiques :énergies renouvelables, bio­ technologies,nana-technologies,génétique,puisqu'il nous semble que les scientifiques eux-mêmes; sont quelquefois dépassés par des phénomènes de tous ordres qui accompagnent leurs inventions.

Nous citerons entre autres,l'éclatement de la centrale nucléaire au Japon qu'il a été impossible de maîtriser, les successions de tornades dévastatrices, face auxquelles les puissances mondiales apposent des moyens somme toute dérisoires, pour tenter de sauver ce qui peut l'être.

Des drames incessants contraignent les mouvements terrestres où l'homme s'avère impuissant et démuni. Face à la colère des volcans ressuscités,crachant des millions de tonnes de lave et de cendre, la circulation aérienne s'en est trouvée bloquée.

Tous ces exemples ne constituent évidemment pas une apologie de l'obscurantisme mais il est tout simplement question ici de la faiblesse de la condition humaine face au déchaînement des éléments. L'homme,sur le plan technique,est loin d'avoir parachevé sa maîtrise de la nature.

Le thème sur lequel je m'exprimerai cependant, devant vous, est celui du parcours scolaire propre à notre génération,sous la domination coloniale. Les objectifs visés par l'administration coloniale répondaient à une politique de blocage de toute velléité d'avancement intellectuel, de ceux que l'on appelait des« indigènes ».

Je vais vous dresser un tableau réel de ce que j'ai vécu personnellement, ainsi que toute notre génération dont mon ami Hadj Mokhtar Khelladi, en espérant que les jeunes d'aujourd'hui, en tireront un enseignement positif.

Dés la prise de décision politique et militaire du gouvernement Français,CharlesX,d'envahir l'Algérie au début du l9°siècle ;il était évident pour celui-ci de la coloniser définitivement jusqu'à en faire 3 départements français.

Les militaires français étaient chargés d'éliminer toute opposition à l'occupation,et parallèlement de procéder à des« nettoyages» systématiques

en éliminant physiquement aussi bien des postes stratégiques que des terres fertiles les habitants arabe-berbères.

La prise de décision politique de coloniser l'Algérie conduisait à la mise en place d'une population européenne, bigarrée, surtout d'origine espagnole. Cette politique d'implantation de population fut accompagnée d'une politique d'élaboration des infrastructures nécessaires au développement des activités économiques,particulièrement de l'agriculture. Ceci imposait le concours

d'une main d'œuvre abondante et corvéable à souhait qui ne pouvait être fournie que par la population autochtone.

Là commence notre histoire de la conception scolaire élaborée par le colonisateur pour modeler à sa manière, cette main d'œuvre locale, ignorant le français et le calcul :deux éléments absolument indispensables pour développer l'économie coloniale. Des écoles« spéciales indigènes »furent donc créées parallèlement à un système scolaire performant destiné exclusivement à des européens.

Dans les classes indigènes,le programme était réduit à sa plus simple expression.

-Faire accéder à l'école, les indigènes à un âge relativement avancé : 7/8 ans, dans le seul but de leur apprendre quelques notions d'hygiène, des rudiments de français et surtout des additions et des multiplications...Ces éléments étant bien entendu nécessaires à la communication avec le patron-colon dans le développement de son entreprise.

Une fois que cet embryon d'enseignement était dispensé, l'examen de fin d'études primaires permettait d'éliminer 80 à 90% des élèves, ce qui les empêchait de poursuivre leurs études afin de se présenter au certificat d'études ou à la 6 d'une part, et qui permettait au colon de s'approvisionner en main d'œuvre d'autre part.

Ayant effectué mon parcours scolaire dans ce contexte, avec,des amis ici présents, nous avons grâce à une volonté extraordinaire franchi tous ces barrages criminels avant le lycée.

Je vais vous décrire rapidement le programme des 3 années d'enseignement primaire et vous faire connaître les maîtres que nous avons subit.

Entrée à l'âge de 7 ans à l'école préparatoire, où l'on s'occupait de nous en nous faisant jouer, chanter entre autres« la Marseillaise ».

Au bout de ces deux années d'activités ludiques; la moitié des élèves était pour une raison ou une autre éliminée : Malpropreté, absence, maladie..

La seconde moitié intégrait la fameuse classe du cours élémentaire où se pratiquait l'enseignement à la mode colonialiste, dirigée par un vieil instituteur dont nous gardons le nom : Mr Salabouss.

En quoi consistait ce programme?

-Les matinées étaient consacrées à l'apprentissage de l'alphabet, de la lecture, de l'écriture et du calcul, particulièrement, les révisions des tables de multiplication avec la menace omniprésente du bâton de Mr Salabouss pour ceux qui ne les connaissaient pas par cœur.

Les après-midi étaient régulièrement consacrées aux loisirs. Evidemment, cela nous plaisait beaucoup, car il s'agissait de sortir de l'école en rang pour aller vers la forêt,tout en batifolant.

Une fois arrivés à destination; nous parcourions la forêt, à la recherche, selon les saisons;de fleurs à cueillir pour Mme Salabouss, et de champignons ou asperges pour Mr Salabouss ,lui garantissant son repas

Nous retournions à l'école, heureux, avec l'inconscience de notre jeune âge ; attendant impatiemment notre récompense; les bons points.

Les jours se succédaient selon ce programme, jusqu'à l'examen final de passage vers le cours moyen qui existait normalement pour les élèves européens, et, seuls 2 ou 3 rescapés de Salabouss étaient admis à ce niveau. JI est inutile de vous décrire le calvaire de cette année scolaire du cours moyen.

On nous confrontait, nous qui ne connaissions que nos tables de multiplication, à des européens rompus à la dictée, au vocabulaire et aux problèmes de calcul. Nous étions fatalement classés parmi les deux derniers.

JI fallut un effort considérable de la part de nos parents (Allah yarhamhoum}en payant des cours supplémentaires pour que nous puissions passer l'examen de 6° de ce collège. Voilà pour le 1er barrage. Parvenus en 6°, se dressaient d'autres écueils : Mal notations des indigènes, insultes verbales; jugements et appréciations péjoratives. Certains enseignants ne cachaient même pas leur racisme. Il faudrait cependant signaler que certains enseignants Européens étaient intègres, malgré les consignes de l'administration.

Au cours de cette période de collège,je relèverai deux épisodes particulièrement humiliants relatifs aux étudiants musulmans, dans le but de les décourager. Celui de la visite médicale. Celui de la préparation à l'instruction militaire. Un cas particulier concernant un enseignant tristement connu pour ses positions racistes et pétainistes, récupéré par l'institution de l'enseignement après la 2° guerre mondiale pour enseigner la philosophie :Mr Paxiannus(Rappeler mon histoire et donner la conclusion relative à notre examen au BAC sciences expérimentales obtenu avec la mention AB.

Après le BAC, les indigènes étaient théoriquement autorisés à s'inscrire au niveau de toutes les spécialités. Mais en pratique,seules les spécialités de médecine, d'avocat et d'enseignement étaient autorisées. Il faudrait également souligner que l'épreuve du BAC était réellement impartiale.

Voici donc tracées les grandes lignes de l'enseignement tel qu'il était pratiqué par l'administration coloniale.

Pour conclure il est évident que toutes ces injustices commises par l'administration coloniale ne firent que faire naître et renforcer au niveau de tous les étudiants Algériens l'esprit nationaliste qui préparait la déflagration de 1954,et l'avènement de notre indépendance le Sjuillet 1962.

C'est ainsi que vous êtes aujourd'hui,ici, très nombreux et surtout très nombreuses, pour fêter cet acquis forgé par vos aînés. Vous en êtes les dépositaires et soyez en dignes.

Gardez-vous des solutions de facilité fournies en abondance, à notre époque par les progrès technologiques réalisés ailleurs.Je pense aux technologies de l'information et de la communication qui offrent une véritable manne en matière de fraude. Nous faisons confiance aux nouvelles générations pour contourner ces écueils d'un autre type. Il n'y a de vrai que le vrai,c.a.d.l'intègre et le propre. Dieu n'accepte que cela.

Avant de terminer, je félicite une nouvelle fois, la communauté des enseignants et des étudiants du collège de Mascara pour les brillants résultats obtenus aux examens du brevet et du BAC. Nous vous souhaitons de persévérer dans cette voie.

Permettez-moi pour finir de faire appel personnellement aux responsables du sport,particulièrement ceux du football Mascarien pour recréer l'esprit de notre mythique GALLIA, dont nous gardons un souvenir indélébile. Il a participé à la prise de conscience de tous les jeunes en menant la bataille sur les stades.

Alors,Mr Belloumi, à votre ballon afin que vous puissiez porter haut les couleurs de Mascara.

Je vous remercie pour votre attention et votre patience. Mascara,le 13/07/2011.

 



   

PUBLICATION DU Pr KHELIL .2

Curieux endroit qu'a choisi le Pr KHELIL pour situer le déroulement de son histoire. Ce choix en réalité n'est pas fortuit: ce phénomène de la file d'attente révèle l'un des malaises chroniques que ressent le citoyen algérien. Pour les deux acteurs de ce roman ce lieu constitue l'observatoire idéal pour scruter, observer et sentir physiquement le resenti de ce malaise social. Le dialogue des deux amis, l'un agronome l'autre journaliste, passe en revue tous les problèmes qui empoisonnent la vie quotidienne de l'algérien. Dans l'épilogue l'auteur propose des solutions basées sur des études scientifiques qui doivent accompagner une réforme en profondeur de notre système socioéconomique et donc politique. Comme d'habitude chaque publication du Pr KHELIL constitue une nouvelle contribution positive  au débat national.A.B

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